Révision au fond de nos modes de gouvernance

 

Les principes qui régissent la gouvernance d’un état sont différents de ceux concernant l’entreprise.

Les premiers relèvent de la cohésion sociale, les autres de l’efficacité pour créer des richesses.

Il convient de les décliner indépendamment.

Réorganisation des moteurs de la société

Tu parles comme les grandes personnes : tu confonds tout, tu mélanges tout.
(Antoine de Saint-Exupéry)

 

L’idéologie a pris le relais de problèmes humains concrets en prenant comme prétexte la préservation de l’emploi. Or ce dernier concept est mouvement, amélioration pour une meilleure efficacité.

Mais il ne faut pas confondre «emploi» et «travail».  Les luttes contre l’automatisation ont pour prétexte la préservation de l’emploi global, en réalité au niveau local.

Or si le premier relève de l’économie et de la collectivité, le «travail», quant à lui, ne concerne que l’individu. Il faut aider celui-ci à dépasser un problème pour une solution durable et enrichissante, non pour le maintenir dans un statu quo ante délétère. Ayant longtemps travaillé dans la sidérurgie, de 1968 à 1993, avec ses restructurations successives, ses remises en cause, les interventions de l’État pour raison notamment  d’aménagement du territoire, sa nationalisation, puis dès 1985 son redressement jusqu’en faire un fleuron national avant de le céder à d’autres, je pense être à même de pouvoir analyser ces problèmes.

 

L’emploi est une donnée économique qui doit répondre uniquement à l’adéquation des besoins de la société à un certain nombre de tâches nécessaires à sa vie et son développement. Son estimation, nombre et qualifications, dépendent à un instant t des besoins instantanés et futurs en fonction des politiques prospectives choisies au plan global. Mouvant, ajustable en permanence, le plein emploi doit être recherché pour raison d’efficacité de cet ensemble société. Pour ce faire, il faut donc utiliser tous les moyens possibles pour y tendre : éducation et culture permettant un niveau de connaissances susceptible de faciliter des qualifications adaptées, aptitude à la mobilité tant intellectuelle que physique, accueil et insertion dans le pays des forces vives venant de  l’immigration…. Au risque de se fourvoyer, ce chapitre n’a rien à voir avec la morale, les sentiments et la compassion : c’est une donnée objective d’investissement. 

En face, sans l’opposer mais en complémentarité, se situe «le travail». c’est perçu comme un coût pour l’ individu concerné alors que c’est au fond une valeur qui fonde son utilité, donc son être. L’adéquation entre son vécu personnel et «l’emploi», sa volonté d’enrichissement (formation continue ou salaire), tout est vécu comme un effort personnel non récompensé. L’aménagement des horaires ou une facilitation de la mobilité (logement qui fixe l’individu sur place) sont des revendications justifiées à son niveau individuel. Toutes ces contraintes de vie sont personnelles et d’ordre moral. 

Pour l’entreprise, c’est aussi une occasion d’enrichissement qui, de pair avec l’aspiration individuelle, conjugue son propres intérêt. La motivation et le sentiment d’appartenance à une collectivité sont un atout pour la cohésion de l’entreprise. 

Mais il ne faut pas mélanger ces deux aspects qui doivent être traités séparément mais avec une synthèse au sein de l’ensemble autonome. Ce qui est dit ici vaut pour toute collectivité : organisations sociales, associations, politiques et syndicats en tête, elles ont ici toute leur place de responsabilité et d’action. Il faut donc faire une distinction entre individuel et collectif (ils se situent à des strates différentes d’analyse) puis en faire la synthèse en vue de la performance globale. 

Gérer donc conjointement sans mélange ces deux aspects demande une nouvelle technique propre à mesurer en temps réel les aspects matériels et immatériels, en séparant coûts et investissements. Pour ce faire il convient de revoir au fond ce système de mesure officielle qui conduit à la paupérisation de la main-d’œuvre, organise les délocalisations, conduit au déclin…Pour s’en convaincre, il suffit de regarder certains aspects de la «comptabilité analytique». Actuellement, c’est au sens propre une comptabilité de coût, issue d’une comptabilité générale dont le seul but est à juste titre de mesurer les patrimoines, le matériel. Subdivision de cette dernière depuis plus de deux cents ans (son nom était alors comptabilité industrielle, en phase avec la dimension capitaliste de l’époque !), pour raison de gigantisme,  de volonté de puissance et de souci de traquer le gâchis, elle s’est concentré sur les coûts visibles. 
Si nous voulons aller vers l’avenir, il faut revoir cette technique de mesure datant d’un autre temps en incorporant une dimension dynamique, remplacer la photo par la caméra et en temps réel par la video et internet. Cette comptabilité des flux réconcilie les points de conflits qui se cristallisent faute de mesure rigoureuse et bien structurée. Ainsi, on doit séparer ces deux concepts, placer «l’emploi» au crédit comme un investissement puisque révélateur d’un besoin et mettre au débit le «travail», la main-d’œuvre embauchée pour couvrir ce poste. Ces deux flux étant parfaitement identifiés et isolés, les directions des ressources humaines seront ainsi responsabilisées sur leur politique sociale. 

Au risque de choquer au premier abord, l’écologie et sa chasse aux gaspis sont parfaitement complémentaires de l’esprit d’entreprise. Associé aux efforts d’une entreprise tournée vers une qualité totale non dévoyée, le sens écologique doit travailler sans a priori dans le même sens. 

Ce point capital, associé aux concepts de l’ensemble autonome et de la mesure, sont un préalable pour poursuivre notre avancée.Tout ensemble humain, entreprise, association, parti politique, syndicat est ici directement concerné : il traite de la césure de mesure entre l’intérêt individuel et la dimension collective du vivre ensemble.

La fiscalité : les ressources

Dans cet esprit, la fiscalité prend une autre dimension. Elle est le seul moyen de collecter pour l’État une partie des richesses qu’entreprises (via les charges et taxes diverses) et particuliers (via IRPP, TVA et autres taxes) ont pu générer à l’instant au cours de leur existence.Elle est donc au sens strict amorale et est régie par le seul critère de l’efficacité globale. L’entreprise est à cet égard une vache laitière, non une viande boucherie. Il est impératif de la maintenir en vie, en bonne santé et à notre service. C’est un animal domestique, consommant dans les champs et produisant à l’étable. ELLE FAIT PARTIE DE LA FAMILLE. Il en est de même du contribuable.

 

Parallèlement, la nécessité de redistribution est évidente et d’ordre moral. Sans chercher ici une exhaustivité, la production des richesses est injuste selon que l’on est bien placé, protégé aux plans social, économique, conjoncturel, implantation et autres. Le côté relationnel, familial ou amical est naturel et symbole de vie en commun, mais il accentue l’iniquité entre ensembles autonomes. Une redistribution est également indispensable pour rééquilibrer l’exploitation des richesses et la création des conditions adéquates, la recherche qui par définition est une richesse différée.Tous ces aspects relèvent de la responsabilité de l’ÉTAT, instance régalienne, en direct ou en sous-traitance à travers les organismes habilités et contrôlés, ainsi que les associations.

 

Au risque de choquer les idéologues, tout le monde doit payer des impôts pour préserver la dignité et le droit d’être citoyen à part entière. Le principe des niches fiscales est légitime pour augmenter les réserves de fiscalité, l’aide aux plus démunis et l’assistance mondiale est une ardente obligation pour les aider à redevenir indépendants. Mais tout doit être transparent et rentrer dans les comptes pour asseoir l’équité.

 

Tout revenu, y compris Allocations familiales, aides et subventions, a vocation à être fiscalisé. La transparence et l’équité entre individus est à ce prix. Cette distinction comptable est fondamentale pour la responsabilité de l’individu qui prend alors conscience que les aides dont il bénéficie ne sont ni de la charité ni un droit. Elles sont la marque officielle de la contribution nécessaire et équitable de la société à la personne pour qu’elle survive dans l’harmonie. Tous deux doivent en être pénétrés.

Isoler ces deux flux est le meilleur moyen d’y voir clair et de tendre à l’équité.

 

C’est toujours l’individu qui paie, consommateur, salarié ou patron d’un capital (industriel ou financier) : TVA, diminution ou aggravation des charges sociales, allocations familiales, taxations, tout se retrouve in fine dans le prix final d’achat. Seule la sensation du court terme est ressentie. Les modalités sont cependant différentes suivant que l’on oriente ces flux dans telle ou telle direction : c’est de la responsabilité de l’État que décider de la politique à mener pour que règne l’harmonie dans l’ensemble à travers l’équité. Mais tout changement doit se voir à l’aune du long terme tout en préservant l’urgence du court terme.

 

Nous sommes dans des ensembles complexes et seule la clarté des choix  – la séparation entre entrée des richesses (fiscalité entre autres) et sortie (redistribution sociale et économique) – est la réponse pour aborder de manière saine la complexité de ce problème fondamental  qu’est la recherche de la richesse maximale pour la collectivité et la redistribution optimale pour les individus  c’est le rôle du moniteur.

Refonder le système associatif

Les associations sont des agents économiques à part entière.

Les associations ont comme légitimité la liberté de se réunir pour participer à quelque chose dont la définition est plus une aspiration qu’un projet précis. Leur caractéristique est aujourd’hui de réunir des forces bénévoles et salariales au service d’actions «financées» par des apports extérieurs, groupes privés ou établissements publics. Il faut au départ distinguer le fonctionnement courant de l’institution (autofinancé par les cotisations et géré comme un centre de coût indépendant)  des actions déléguées en phase avec son projet (financées et contrôlées de l’extérieur  ; gérées en partenariat ou délégation). L’activité des associations est soumise uniquement en décision interne d’assemblée générale.

 

Ces structures de plus en plus complexes n’ont plus rien à voir avec les statuts des lois de 1901 et 1907 (droit local d’Alsace-Moselle) toujours en vigueur pour l’essentiel. Les flux financiers étant très importants, ces organisations relèvent pour beaucoup du secteur économique.

Il n’est pas inutile de revenir sur le cas particulier des ONG. Celles-ci sont des entreprises à part entières et il est surprenant de les voir avec ce statut de bénévolat. L’emploi de salariés qui est pratique courante dans ces organisations est souvent incompatible avec la liberté d’association de bénévoles. Reconnaissons cependant que cette catégorie va dans le sens de la promotion de l’activité volontaire qui se développe individuellement au titre moral, mais cela ne peut se généraliser à statut inchangé.

 

La vie en Société ne peut se priver aujourd’hui de l’apport essentiel des associations. L’État ne peut pas tout et a besoins de relais en matière sociale et humanitaire. En parallèle au monde économique, et bien séparé de celui-ci, ces groupements doivent procéder également à un bon dépoussiérage juridique. Ce n’est pas être hors de propos que se pencher sur  ces structures car elles sont, avec les entreprises, l’autre facette de l’implication humaine dans l’action.

 

La caractéristique de groupement d’individus sans objectif de profit, matériel ou psychologique, est désormais équivoque. Des aménagements sur ce statut doivent être entrepris pour des raisons évidentes de transparence et de sécurité car tout regroupement est un pouvoir en puissance. Nos associations sont plus que centenaires sans avoir été revues quant à leur positionnement.

 

Rouage essentiel de notre communication moderne, souvent contre-pouvoir de fait, l’association pose problème aux yeux de tous dès qu’elle prétend intervenir dans la vie publique, notre cadre de vie quotidien.

 

Il ne s’agit plus d’un ensemble cohérent mais d’une collection de particularismes auxquels l’État donne droit de cité. La tendance au clientélisme est évidente. De nombreuses dispositions consacrent l’importance de différents organismes assurant une fonction d’intermédiaire entre la population et l’Etat. C’est donc un réseau structuré qui fait intervenir en symbiose tous les acteurs de la société. Indispensable, néanmoins il coûte cher et doit être encadré.

 

Il faut envisager un rôle accru de l’association, à la mesure de ses possibilités mais en revoir son statut juridique et son mode de fonctionnement. Elle ne doit plus seulement être tolérée ; elle est de fait partie prenante dans les changements dans ce monde de communication. En un mot il faut lui reconnaître, non plus seulement une liberté à exister, mais une capacité à exercer. Si l’on entend donner droit de parole et de contestation à une collectivité, voire le pouvoir d’intervenir dans le concert des acteurs économiques et sociaux, ce ne peut être que dans un contexte de responsabilité.

 

Au sein de ces organisations, la transparence est une exigence incontournable, le contrôle des donneurs d’ordre impératif et professionnel. Leur impact devient de plus en plus économique comme c’est le cas des ONG et grosses associations collectrices de fonds sociaux.

 

À l’aune des scandales qui se sont succédés ces dernières années, et sans remettre en cause l’utilité, actuellement, on assiste à un énorme gâchis dans ce domaine, ce qui nuit de plus à l’efficacité de ces structures et au service optimal à rendre. Les pouvoirs publics ont donc ici un gros travail à entreprendre pour remettre de l’ordre dans ce foisonnement d’organismes similaires et concurrents, leur fonctionnement et leur contrôle. Une remise en cause personnelle de chaque association est nécessaire quant à ses buts et son fonctionnement, ne serait-ce que pour sa pérénnité. Les subventions ne doivent pas précéder  l’objectif global de service. À partir d’un objectif d’utilité globale, une délégation à des associations doit être précise et formulée en termes contractuels.

 

Il faut revoir au fond : la transparence des organisations, l’adéquation des statuts aux activités, la synergie de réseaux et la sécurité des transactions

La structure n’a de valeur qu’au seul service du projet

Toute structure est mortelle. Mieux, elle n’a de sens que si elle apporte une valeur ajoutée (financière ou immatérielle). Sinon elle est nuisible car elle encombre. D’où l’importance de la réactivité, tout en ménageant ce qui doit rester stable (pour que chacun garde ses marques) et ce qui doit aller à la vitesse du monde.

 

Rappelons que les trois aspects du bon fonctionnement potentiel d’un ensemble autonome sont les suivants:

– un projet global qui fonde la raison d’être de la dynamique à promouvoir

– une structure déléguée responsabilisée pour atteindre ses objectifs, avec :

          ° une unité de décision en phase pour les poursuivre,

          ° des moyens clairement identifiés mis à sa disposition

– un système d’alerte pour détecter les dysfonctionnements et y remédier.

Si il y a dysfonctionnement, on en identifie la raison et on envisage la remise en ordre du processus. Si l’origine en est structurelle, on remet à plat la totalité du fonctionnement de l’ensemble autonome. S’il s’agit d’une erreur humaine ponctuelle, on agit seulement pour agir sur l’intéressé.

Il importe de susciter le maximum d’adhésions au projet. Il doit être stable pour ne pas déstabiliser les acteurs qui y sont associés. Par contre les organisations doivent être réactives et suivre les évolutions, remédier aux difficultés ou faciliter son avancement.

 

Les organisations, structures et management, doivent se positionner (création, modification ou disparition) par rapport au projet et à son stade de réalisation. Tout ceci a donc un caractère provisoire. Contrairement à ce qui se passe actuellement, il ne faut pas entasser mais repenser : énoncée pour les structures, cette démarche vaut également pour les règles du jeu, tout ce qui relève du management.

 

Les départements Recherche et développement et Assurance qualité sont voués au produit et à leur mode de fabrication. Rien n’est prévu pour les autres secteurs, tout aussi essentiels pour la santé de l’entreprise-ensemble autonome. Encore une fois, il faut savoir irriguer les domaines opérationnels et fonctionnels (l’entreprise vivante) non en mettant à côté une structure d’expertise mais en l’intégrant dans le tissu de chaque établissement.

Au management de trouver les moyens selon le schéma imbriqué de collaboration (l’expertise), et de mettre en œuvre avec ses opérationnels et ses spécialistes (délégation) ce projet avec les moyens dédiés et au coût minimal, et ce en bon gestionnaire.

Travailler ensemble

Il ne s’agit pas de séparer ici les activités marchandes des activités culturelles, sociales ou associatives.

Toutes relèvent d’un préalable, savoir mesurer, tant la nature humaine a toujours tendance à s’approprier le bien d’autrui et que seul le collectif a la possibilité de réagir et de rééquilibrer en allant vers l’équité.

 

Les coûts, négociés ou imposés, car relevant de la comptabilité générale, sont la liaison avec l’extérieur : ils ne sont pas remis en cause au plan de l’analyse.

 

Il n’en est pas de même au sein d’un ensemble que l’on veut voir vivre en «Harmonie». À l’intérieur de cet ensemble, il n’y a plus de mesure de ce type. Le conflit en est exclu.

«La puissance d’un ensemble est supérieure à la somme des puissances des sous-ensembles qui le composent» (théorème de Cantor)

S’il y a conflit, l’ensemble se désagrège et se reconstitue sur une dimension plus restreinte mais homogène. C’est la loi naturelle des civilisations. Moins efficace au plan global, les sous-ensembles ainsi reconstitués peuvent se rassembler au plan partenarial et se révéler plus performants.

 

Le concept d’ensemble autonome répond à cet question en mesurant sans biais et en dynamique toutes les initiatives, les effets et les conséquences.

Dans un logiciel conçu à cet effet, il remet, chiffres en main, les différents responsables en face de leurs initiatives. Il leur impute automatiquement et de façon neutre les dysfonctionnements dont ils ont été responsables et inversement créditent «les victimes». C’est dans la transparence des actions de chacun vis-à-vis des intervenants et dans le réajustement des dysfonctionnements que se construira l’Harmonie entre un but commun et des acteurs indépendants.

Toute opération est enregistrée dans la comptabilité des flux au nom de la transparence au sein de l’ensemble autonome. Neutre, et automatique en temps réel, ce logiciel rend compte de l’apport à la collectivité et rééquilibre les dysfonctionnements : c’est le moniteur.

 

 

En Conclusion

 

Seul, Robinson Crusoë n’a fait que survivre sur son ile. Mais grâce à Vendredi, il a créé de la richesse et pouvait la partager.

Cette approche mobilise les acteurs dans une dynamique non frustrante car elle ne s’attaque pas à l’individu mais au défaut d’intérêt réciproque, de communication et de cohérence entre les structures qu’ils sont chargés de gérer indépendamment.

Le problème est collectif et non individuel mais on fait appel à la responsabilité de chacun pour résoudre le problème de tous.

Sans détruire ni la structure ni le fonctionnement interne de chaque cellule, le gain global en valeur et surtout en efficacité est à la source de la conquête de l’harmonie de la vie d’entreprise.  Les pratiques de qualité totale qui ont été activées de manière inconsidérées, pour des intérêts à court terme, sont alors à même de produire tous leurs effets en aval, à condition d’en revoir toutes les dérives qui ont pollué leur utilisation.